A la recherche du jardin perdu

Suite a un tres agreable apres-midi a me promener avec Pauline et Agnes, les deux malchanceuses, il m'a ete un peu difficile de prendre ce metro vers la gare. Tentee par leurs supplications de rester avec elles pensant que je leur portais chance, decouragee par leurs histoires malheureuses et echaudee par ma propre experience du train Calcutta-Bombay, il m'a fallu profite d'un gros elan de volonte pour finalement sauter dans ce train de nuit en partance pour Shangai. Mais a l'interieur, quelle bonne surprise ! En rentrant d'Inde, je me souviens que j'aurais embrasse le premier logo SNCF croisant ma route mais la je dois dire que les trains de nuit chinois, vraiment, c'est le grand luxe. Propre, couchettes tres confortables, casiers pour les sacs, the a volonte et wagon-restaurant digne de l'Orient Express. Je n'ai malheureusement pas pu en profiter, mon estomac ayant choisi ce moment pour ce revolter contre toutes ces choses bizarres que je lui fait supporter depuis une semaine. Pas grave, un Smecta, une nuit de 13h recroquevillee comme un petit loir sur ma couchette, de la tres bonne musique dans les oreilles (Bill Evans pour me bercer et Missy Elliott pour me reveiller et m'aider a evoluer en rythme dans la maree humaine de Shangai), - merci aux deux anges gardiens qui ont glisse ces pansements tres efficaces dans ma valise - et me voila 14h de train de nuit et 30 min de train rapide plus tard (un train blanc ultramoderne aux allures de Concorde, peut-etre l'un des trains achetes a la France)  enfin a Suzhou. J'ai quand meme profite de l'etape pour me promener un peu dans les avenues de Shangai histoire de dire en rentrant a Pekin que je suis passee chez l'ennemi. Car si il y a bien une chose que les pekinois detestent au moins autant que les japonais (raisons historiques que vous connaissez et page qui a du mal a etre tournee entre les deux nations ennemies en raison d'une certaine tendance au negationisme de la part de Tokyo concernant certains massacres de l'entre deux-guerres) c'est Shangai. Les deux villes se detestent car Pekin accueille les JO en 2008 mais Shangai organise l'expo universelle en 2010. Les deux municipalites se livrent donc une guerre sans merci au niveau de la com et des projets architecturaux megalomaniaques. Ce qui m'a drolement surprise etant donne l'image tres centralisee que j'avais de l'administration chinoise.

Je suis donc finalement arrivee (apres les habituelles difficultes liees au moindre deplacement en transports en commun en Chine) dans l'auberge de la vieille ville de Suzhou. Pour quelques photos de l'auberge et de la ville, faites defiler cette page jusqu'au bout : http://www.joyahostel.com/joya_today_en.htm

Suzhou, ville legendaire pour ses canaux, sa production de soie et ses jardins, classes patrimoine mondial de l'Unesco pour  7 d'entre eux et raison principale de ma presence ici. Car si beaucoup aiment a decouvrir une ville, une region, un pays a travers ses musees et monuments, moi j'ai plus de plaisir a les decouvrir a travers ses parcs, jardins, bibliotheques, librairies et marches. Dans les parcs et jardins, quelque soit l'endroit, on peut observer tranquillement des personnes de tous ages jouant, faisant du sport, se detendant ou travaillant, des familles, des couples ... et ce qui est vrai partout, l'est encore plus pour la Chine. Hier en me promenant dans un parc pekinois, j'ai vu des personnes agees pratiquant le Tai-Chi, des chorales repetant, de vieux messieurs en pleine partie de ping pong (ils m'ont proposee de participer mais vu leur niveau je crois que je n'aurais pas pu renvoyer la moindre balle), des groupes dansant sur une musique disco, des personnes entretenant leur forme sur des parcours sportifs disposes un peu partout, des enfants jouant a toutes sortes de jeux, des ouvriers installant un dragon en tissu geant sur un lac, des maries en blanc defilant, nombreux, avec des costumes et fleurs en plastique tres defraichis devant l'objectif d'un photographe blase installe devant un faux piano. Cette derniere observation me deprime a chaque fois (car on le voit dans tous les parcs de la capitale) Le blanc en Chine est la couleur du deuil. Traditionnellement, on se marie en rouge et pour ceux qui ont vu le film "Les Filles du Botaniste" , le mariage traditionnel chinois est absolument magnifique : fleurs de pecher dans les cheveux, lampions multicolores, fleurs de lotus autour des maries ... quel dommage et impossible de savoir, meme apres avoir demande a une dixaine de chinoises, pourquoi elles tiennent toutes tant a ce simulacre completement glauque et tres honereux de mariage occidental.

Dans le parc Beihai, l'un des plus grands de Beijing, j'ai eu le plaisir, en m'aventurant dans un coin recule du parc, de tomber sur un petit pavillon au milieu d'une mare remplie de lotus en fleur sur le rebord duquel repetaient sans le moindre public une accordeoniste-chanteuse et un joueur d'un instrument a corde traditionnel. L'harmonie de l'ensemble etait saisissante et j'ai vraiment pris sur moi pour ne pas les deranger en mitraillant la scene. J'en profite pour dire que l'appareil Reflex marche tres bien merci. Je m'en sers pour faire des photos en noir et blanc. Je me suis donc assise et les ai ecoutes sans me lasser pendant plus d'une heure.

Dans un autre parc encore, je suis restee au moins aussi longtemps a observer des hommes et des femmes entre 60 et 80 ans jouant au cerf-volant. Je ne devrais pas parler de jeu car il s'agit ici plus d'un art. Des cerfs volants de toutes les tailles, formes et couleurs survolent Pekin. Mesurant parfois 5 metres d'envergure au sol, ils ne sont plus qu'un point dans le ciel grace aux coups de mains experts de ces virtuoses du vent. C'est vraiment tres impressionnant. Marco, je suis sure que tu adorerais. J'ai d'ailleurs entendu parler d'un vieux magasin au centre de Pekin qui serait entierement consacre a cet objet magique. Si tu veux passer commande, c'est le moment !

Contrairement aux visites de temples, je ne me lasse pas de tous ces jardins car chaque promenade y reserve ses surprises. J'ambitionne d'ailleurs d'avoir visite tous les parcs et jardins pekinois avant de repartir a une exception pres : le parc animalier malgre la tentation de voir des pandas en vrai de vrai et ce pour une raison tres simple : la description peu encourageante qu'en fait mon guide. "Tous les zoos ressemblent a des prisons, mais le zoo de Beijing evoque le couloir de la mort. Seuls les pandas beneficient d'un habitat plus douillet (pour bonne conduite ?). Les ours polaires croisent les griffes pour etre transfere dans leur enfer betonne du grand aquarium [...]on y decouvre un bassin de requins (dans lequel les intrepides peuvent plonger), des baleines (!!!!), des dauphins .... " Les zoos-salle des tortures, j'ai deja donne a Calcutta !

A Suzhou, les jardins portent des noms plus poetiques les uns que les autres : le jardin du maitre des filets, le jardin des couples, la pavillon de la fin du printemps, le pavillon de la vague bleue ... Autre citation du guide : "Les jardins de Suzhou sont consideres comme des oeuvres d'art ou fusionnent la nature, la poesie et la peinture favorisant l'eveil, l'emotion ou l'apaisement de l'ame." Douchee et donc aussi fraiche que l'on peut l'etre sous cette latitute et rassasiee d'un delicieux plat de songshu guiyou (specialite locale : poisson cuit dans une sauce aigre douce), je pars donc m'eveiller l'ame dans ces havres de paix situes, pour la plupart, a quelques minutes a pied de l'auberge.

Bonne journee a tous en esperant vous avoir convaincu de dejeuner dans un jardin ce midi ... si le temps le permet.

Comments

[Maarion]

Ines Ines on est en train de faire le grrraaaand menage a thouare, est-ce qu on peut jeter ton billard ???
(a part ca, non, je suis pas jalouse du tout, de toute facon j aime pas les jardins moi.)
Bisous.

[Pa]

Est ce que par hasard tu n'aurais pas trouvé encore un super plan avec ce nouvel hotel? En tout cas on ne se lasse pas trop de tes nouvelles. Merci.
Signé Pa un tout petit peu jaloux! ;-)